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Samedi 3 Août 1940

Pas encore de lettre. Pourtant je suis certain que ma femme m’a écrit à moins d’un cas grave alors, soit qu’il se soit passé quelque chose chez moi, ou en ce que je crois plutôt, les lettres sont retenues au camp car depuis jeudi aucun de nous n’a eu de lettre.

Peut-être que nous n’avons les lettres qu’avec les journaux tous les jeudi. J’ai hâte d’être à ce jour.

 

 

 

Lundi 5 Août 1940

Rien de spécial à signaler. Nous rouspétons pour la nourriture qui ne varie guère et n’est pas fameuse.

En ce moment où la moisson bat son plein, nous travaillons dur et on pourrait nous donner autre chose que des patates avec un peu de graisse et de confiture pas fameuse d’ailleurs.

La libération ne vient pas vite non plus. Nous en causons beaucoup mais ca n’avance rien. J’ai le cafard, toujours pas de nouvelles de ma femme. Vivement mercredi car il y aura peut-être des lettres.

 

Dimanche 4 Août 1940
11ème

C’est le onzième dimanche que je passe en captivité. Encore combien à passer encore.

Je n’ai pas eu le temps de m’ennuyer beaucoup car j’ai eu de l’occupation. Nous avons battu à la machine jusqu’à une heure et après manger, j’ai fait ma toilette et lavé mon linge sans savon. Ensuite c’était les corvées, le souper et le raccommodage.

Il est tard et je vais aller me coucher. Avant de m’endormir je vais penser comme chaque soir, au bon temps d’avant guerre quand j’étais avec ma chère Henriette et aux quelques heureux jours de mon mariage.

 

Mardi 6 Août 1940

J’ai pris vingt-neuf ans aujourd’hui.

C’est un bien triste anniversaire. J’espère bien que c’est le seul et unique que je passe ici.

Ce jour est à marquer d’une croix. En effet le patron ayant trouvé qu’on travaillait bien, il nous a donné un demi litre d’une sorte de cidre et plus d’une demi boule de pain chacun. Ce n’est pas beaucoup car le travail est dur mais étant donné sa ladrerie, ce geste nous a étonné.

Demain j’aurai peut-être une lettre de ma femme. J’y ai pensé toute la journée.